Torbey : Le secteur bancaire libanais ne peut pas se permettre de salir sa réputation ni de semer un quelconque doute sur sa bonne foi.
Depuis quelques années, les États n’ont plus le choix : s’ils veulent faire partie du système financier international, ils doivent mettre en place tous les moyens pour combattre le blanchiment d’argent et les financements terroristes. Le Liban n’y échappe pas.
« Le plus grand défi pour le secteur bancaire libanais est de conserver sa bonne réputation. » Les propos du président de l’Union internationale des banquiers arabes (UIBA), Joseph Torbey, ont été tenus hier au cours d’une conférence organisée par l’Union des banques arabes (UBA) et en partenariat avec l’UIBA et la Commission spéciale d’investigation (CSI) de la Banque du Liban (BDL). Les intervenants ont mis en lumière «les dernières nouveautés en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et de financements terroristes».
Selon les chiffres avancés par l’UBA, les activités financières illégales transnationales rapporteraient chaque année 3 500 milliards de dollars aux criminels. C’est précisément pour combattre ce fléau que la communauté internationale, entraînée principalement par les États-Unis et l’Europe, a créé en 1989 le Groupe d’action financière (GAFI) qui a pour mission de concevoir des normes et réglementations, non impératives, qui serviraient de ligne de conduite aux différents États.
Cependant, ce choix de collaboration n’en est pas vraiment un. « Si aucun organisme international ne peut forcer les États à collaborer en matière de lutte contre la criminalité transnationale, notamment en matière de blanchiment d’argent, les États sont aujourd’hui intrinsèquement liés au système financier mondial et ne peuvent prendre le risque de s’en voir exclus », a souligné M. Torbey. « Depuis quelques années par exemple, les États-Unis ont fait de la lutte contre l’évasion fiscale leur cheval de bataille et ont établi des listes noires de certains pays et partis qu’ils considèrent terroristes », a poursuivi le président de l’UIBA. Selon lui, le secteur bancaire libanais ne peut pas se permettre de « salir sa réputation ni de semer un quelconque doute sur sa bonne foi, surtout que les banques libanaises sont présentes dans 121 villes à travers le monde ».
Une nécessaire mise à jour...
« Les organisations criminelles transnationales ont largement su adapter leurs méthodes
d’action et sont aujourd’hui à la pointe des nouvelles technologies. Les autorités de contrôle, en collaboration avec le secteur bancaire, doivent ainsi, elles aussi, sans cesse se renouveler et trouver de nouveaux outils et méthodes de lutte », a insisté M. Torbey.
« En avril 2001, le Parlement vote la loi 318 qui édifie les principaux piliers légaux en matière de lutte contre le blanchiment d’argent », a souligné Amine Awad, membre de la commission de contrôle bancaire. « La BDL a émis, depuis, plusieurs circulaires pour s’adapter aux normes internationales », poursuit-il. Parmi elles, la circulaire 128 qui impose à toutes les banques libanaises de créer un département des affaires juridiques, responsable de veiller au respect des réglementations et capable de demander des comptes à tous les employés et directeurs de la banque.
La Commission spéciale d’investigation (CSI) à la BDL, autorité en charge de la lutte contre la criminalité financière, a, quant à elle, vu son activité croître en 2012. « Plus de 400 cas de fraude nous ont été signalés l’année dernière et nous avons dû lever le secret bancaire pour 24 d’entre eux et déférer les dossiers au parquet », a indiqué Abdel Hafiz Mansour, le secrétaire général de la CSI. Parmi les principales recommandations de la GAFI, M. Mansour a cité l’adoption d’une approche fondée sur l’analyse des risques, l’amélioration des règles de transparence et, pour les banques, la meilleure connaissance de leurs clients et surtout le renforcement de la coopération régionale et internationale. « L’arrivée à Beyrouth la semaine prochaine du sous-secrétaire du Trésor américain témoigne de cette volonté du Liban d’accroître sa collaboration et de s’engager sans compromis dans la lutte contre le blanchiment d’argent », a conclu M. Torbey.