Les représentants du secteur bancaire de la région se sont réunis hier lors de la vingtième conférence annuelle des banques arabes à Beyrouth pour améliorer l'inclusion financière dans la région.
Les pays arabes enregistrent le plus bas taux d'inclusion financière du monde : seulement 14 % des adultes sont bancarisés, contre 94 % pour les pays de l'OCDE, selon l'indice d'inclusion financière de la Banque mondiale publié en 2014. C'est sur ce constat alarmant qu'a débuté hier la vingtième conférence annuelle des banques arabes, organisée à l'hôtel Phoenicia par l'Union des banques arabes (UBA), en coopération avec la Banque du Liban (BDL), l'Association des banques du Liban (ABL), l'Union internationale des banquiers arabes (UIBA), et parrainée par le Premier ministre, Tammam Salam. La conférence, intitulée « L'accès mondial aux services financiers : une feuille de route pour les années 2015-2020 », a permis aux hauts représentants du secteur bancaire de la région de partager leurs bonnes pratiques et d'établir une feuille de route pour les cinq années à venir.
« Offrir des services financiers et bancaires de base, à faible coût, pour des consommateurs exclus des services traditionnels, permet le développement de la stabilité économique du pays, en encourageant les investissements, notamment vers les petites et moyennes entreprises (PME), afin de créer des opportunités d'emploi », a lancé d'emblée Mohammad Barakat, président de l'UBA.
Bon élève
« L'inclusion financière est basée sur la confiance des individus dans le secteur financier. Au Liban, nous avons recensé 800 000 emprunteurs en 2015 contre seulement 60 000 en 1993, et notre but principal est de continuer à étendre la proportion des clients des services du secteur bancaire, pour créer de la croissance. À cet égard, il existe au Liban plus de 1 200 agences bancaires ainsi que des milliers de distributeurs automatiques de billets », rappelle le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé.
De fait, selon un rapport publié par le Fonds monétaire international (FMI), le Liban se positionne au 13e rang mondial en ce qui concerne le taux de couverture bancaire sur 161 pays en 2014, tandis que son taux de bancarisation a atteint 47 % la même année selon la Banque mondiale. Le Liban est donc le pays le moins à plaindre parmi ses voisins : « La Banque du Liban a vraiment œuvré pour favoriser l'inclusion financière des plus vulnérables, notamment grâce aux plans de relance de plus de 3 milliards de dollars de la BDL, qui ont largement bénéficié aux prêts logement. Mais le secteur bancaire ne peut pas porter ce projet seul, nous avons besoin d'une initiative de l'État », détaille l'économiste Mazen Soueid, qui travaille pour une banque libanaise.
Terrorisme
D'autant plus que l'inclusion financière des populations marginalisées permet à la fois de réduire la pauvreté, mais aussi de faire face à des enjeux sécuritaires importants pour la région comme la lutte contre le financement du terrorisme et le blanchiment d'argent. « Le terrorisme est le fruit de la pauvreté, de l'ignorance et de l'analphabétisme. Et laisser ces citoyens non solvables – du fait d'un manque de savoir-faire ou de patrimoine – hors du champ de l'activité bancaire, devient un danger pour le pays entier. J'ai donc voulu tirer la sonnette d'alarme à l'occasion de cette conférence », explique Joseph Torbey, président de l'UIBA.
Autre objectif, renforcer le rôle des femmes dans la société, ces dernières étant les plus exclues du système bancaire dans le monde arabe. « Moins de 10 % des femmes arabes sont bancarisées. Elles pourraient donc représenter un marché considérable pour les banques car ce, sont des clientes "solvables", elles font plutôt face à des obstacles culturels et législatifs : par exemple, une femme au Liban ne peut pas ouvrir un compte pour ses enfants mineurs, seul son mari peut le faire », explique l'ancienne ministre des Finances Raya al-Hassan, tout en lançant, aux banques arabes, quelques pistes à suivre pour s'engager sur ce marché.